Publié le 30 octobre 2020, mis à jour le 4 janvier 2023
Probiotiques, prébiotiques, symbiotiques… Ces termes font désormais partie du langage courant. Pourtant, ils semblent avoir disparu des étiquetages de compléments alimentaires. En parallèle, on voit apparaître ces dernières années de nouveaux termes comme « postbiotiques » ou « parabiotiques ».
Nutrixeal vous propose ici de faire la lumière sur ces évolutions récentes de terminologie dans le domaine du microbiote intestinal.
Probiotiques et prébiotiques
Les probiotiques et prébiotiques sont des termes utilisés depuis de nombreuses années dans la littérature scientifique, tout comme dans la presse grand-public. Ces concepts bénéficient de définitions bien cadrées :
Ainsi, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les probiotiques sont des « microorganismes vivants qui, lorsqu’ils sont consommés en quantités adéquates, produisent un bénéfice pour la santé de l’hôte » (document CX/NFSDU 02/2, juillet 2002).
Les prébiotiques ont été définis comme des « ingrédients alimentaires non digestibles qui stimulent de manière sélective au niveau du côlon la multiplication ou l’activité d’un ou d’un nombre limité de groupes bactériens susceptibles d’améliorer la physiologie de l’hôte » (Gibson 1995 ; Schrezenmeir 2001).
Selon l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), un symbiotique est défini comme un produit qui contient à la fois un ou des probiotique(s) et un ou des prébiotique(s).
Ces catégories d’ingrédients sont présentes dans l’alimentation générale et les compléments alimentaires depuis des années. Et pourtant, les « probiotiques » et « prébiotiques » semblent avoir disparu des étiquetages. On entend désormais parler de « microbiotiques » et de « fibres ».
MISE À JOUR : JANVIER 2023
Le nombre de microorganismes dans le microbiote intestinal humain a depuis été révisé à approximativement autant que de cellules humaines.
Pourquoi ce changement de terminologie ?
La réponse est liée à la réglementation européenne sur les allégations de santé. Cette réglementation impose que toute revendication sur les bénéfices santé d’une denrée alimentaire destinée au consommateur final (ou de l’un de ses ingrédients) soit préalablement évaluée et validée par l’EFSA (European Food Safety Agency).
Le saviez-vous ?
Lorsque l’EFSA valide une allégation de santé, elle fixe le libellé de celle-ci, qui peut parfois sembler bizarre ou abstrait pour le grand public. Par exemple, pour la vitamine C, l’allégation autorisée sur l’immunité est « contribue au fonctionnement normal du système immunitaire » et non « renforce les défenses immunitaires »…
Par ailleurs, lorsque l’allégation porte sur l’un des ingrédients d’un complément alimentaire, la réglementation impose que le lien avec cet ingrédient soit clairement indiqué. D’où la présence régulière d’astérisques sur les étiquetages…
Les autorités de contrôle considèrent que les termes probiotiques et prébiotiques constituent en eux-mêmes des allégations de santé suggérant un bénéfice physiologique pour le consommateur. Par conséquent, les autorités exigent que l’emploi de ces termes soit restreint aux produits bénéficiant d’allégations de santé validées par l’EFSA.
Pour obtenir la validation d’une allégation de santé par l’EFSA, les industriels doivent soumettre un dossier très conséquent et coûteux. En effet, les exigences de l’EFSA sont hautes, notamment en ce qui concerne les études cliniques obligatoires démontrant l’effet physiologique revendiqué.
L’EFSA, qui s’occupe des denrées alimentaires et non des médicaments, impose que ces études cliniques « d’objectivation » soient réalisées sur des populations saines. Les seules restrictions de populations tolérées portent sur le genre ou l’âge des participants. Mais l’EFSA écarte les études réalisées sur des populations présentant des symptômes pathologiques caractérisés. Et c’est là que le bât blesse ! En effet, que ce soit pour les probiotiques, prébiotiques ou pour beaucoup d’autres actifs nutraceutiques, c’est lorsque l’on cible des individus présentant des déséquilibres (dysbioses) ou pathologies que l’on observe les effets les plus significatifs ! Des actifs très efficaces sur certaines pathologies (ex : amélioration du confort digestif en cas de syndrome du côlon irritable), ne montreront pas forcément d’effet significatif sur une population saine lambda.
Depuis la publication du règlement européen sur les allégations de santé, les industriels ont envoyé plus de 400 demandes d’allégations de santé à l’EFSA pour des produits contenant des probiotiques. Résultat : 1 seule de ces demandes a été acceptée ! Toutes les autres ont été rejetées. Cela représente un taux d’acceptation de 0,25% seulement… Et ce alors qu’il existe pourtant une très abondante littérature scientifique sur les effets physiologiques des probiotiques et prébiotiques pour la prise en charge de diverses dysbioses.
Il s’agit là d’un paradoxe méthodologique et réglementaire dont les experts de l’EFSA sont conscients. Plusieurs groupes de travail se sont penchés sur la question pour formuler des propositions d’amendements aux textes législatifs afin de résoudre ce problème, que ce soit pour les probiotiques, prébiotiques, ou pour les extraits de plantes d’utilisation traditionnelle. Néanmoins, la situation semble aujourd’hui au point mort.
Heureusement, cette impasse réglementaire n’empêche toutefois pas la commercialisation de ces ingrédients ! Mais, pour ces raisons, vous entendrez probablement parler encore longtemps de « microbiotiques » plutôt que de « probiotiques » et de « fibres » plutôt que de « prébiotiques ».
Parabiotiques et postbiotiques
De nouveaux horizons nutraceutiques
Le terme de « postbiotiques » a commencé à être utilisé dans la littérature scientifique en 2013[1]. Mais l’emploi de ce concept explose surtout depuis quelques mois. On commence également à entendre parler de « parabiotiques ».
A la différence des probiotiques et prébiotiques, les postbiotiques et parabiotiques n’ont pas encore de définition officielle. D’après une revue récente de la littérature publiée en 2020[2], on peut cependant les décrire ainsi :
Les postbiotiques sont des mélanges complexes de métabolites sécrétés par les probiotiques : enzymes et autres protéines, peptides, acides gras à chaîne courte, vitamines, acides aminés, acides organiques, etc.
Les parabiotiques sont des cellules de probiotiques inactivées (non-viables), entières ou fragmentées, contenant des composants cellulaires tels que des peptidoglycanes, des protéines de surface, ou des extraits cellulaires bruts à la composition chimique complexe.
Cependant, il arrive couramment que le terme « postbiotiques » soit utilisé pour désigner l’ensemble de la catégorie postbiotiques + parabiotiques.
Comme pour les probiotiques, il est probable que l’on rajoute petit à petit à ces définitions un critère de bénéfice santé pour l’hôte si ces composés sont apportés en quantité suffisante.
Les parabiotiques et postbiotiques suscitent de plus en plus d’intérêt, car la question du maintien de la viabilité des microbiotiques est un vrai défi technologique qu’il n’est pas toujours simple de résoudre.
Au laboratoire Nutrixeal, nous utilisons par exemple dans notre gamme de produits à base de microbiotiques (probiotiques) des technologies de double micro-encapsulation des microorganismes ou des gélules à dissolution retardée, qui permettent de protéger les bactéries de l’acidité gastrique, afin qu’elles parviennent en bonne forme sur leur lieu idéal d’implantation dans l’intestin.
Mais, s’il s’avère que dans certains cas il est possible d’obtenir des effets intéressants avec des microorganismes morts, entiers ou fragmentés, ou avec des métabolites produits par ces microorganismes, cela lève potentiellement un obstacle technologique considérable ! Dans la mesure bien sûr où ces postbiotiques ne sont pas eux-mêmes trop fragiles…
Pour l’instant, les publications scientifiques disponibles sur les postbiotiques font surtout état d’études in vitro ou sur animaux, mais nous n’avons pas encore trouvé d’étude clinique utilisant le terme « postbiotiques ».
Pour bien comprendre la différence entre ces types d’études scientifiques, consultez notre article « Comprendre les études scientifiques : les critères qualité incontournables« .
Il existe cependant des études cliniques sur des parabiotiques et certains de ces parabiotiques sont déjà disponibles sur le marché des compléments alimentaires.
Ces nouveaux « biotiques » déjà dans la gamme Nutrixeal
La gamme Nutrixeal comporte déjà un exemple de parabiotique dans le complexe PyloDetox®, qui contient du Lactobacillus reuteri inactivé (Pylopass®) (Limosilactobacillus reuteri selon la nouvelle nomenclature des lactobacilles).
Par ailleurs, les tétrahydrocurcuminoïdes proposés dans le produit CurcuTech® sont des postbiotiques issus de curcumine. Véritable innovation nutraceutique, ces métabolites naturels de la curcumine, qui bénéficient d’un récent agrément Novel Food, constituent une solution innovante pour répondre au déficit de biodisponibilité de la curcumine. Nos bactéries intestinales transforment en effet naturellement les curcuminoïdes de la curcumine en tétrahydrocurcuminoïdes, plus facilement absorbés par les cellules de nos intestins. La découverte de ce mécanisme naturel, reposant sur l’action de la flore intestinale, a permis d’aboutir à la production d’un ingrédient particulièrement innovant C3 Reduct présentant une biodisponibilité naturellement supérieure à la curcumine classique.
Le produit Nutrixeal Brocosulf® Premium est un autre exemple qui pourrait être qualifié de postbiotique. En effet, ce produit est standardisé en myrosinase, une enzyme qui est naturellement sécrétée par le microbiote intestinal. Cette enzyme permet la conversion de la glucoraphanine (molécule stable extraite du brocoli) en sulforaphane (molécule antioxydante fragile). En réalité, dans Brocosulf® Premium, la myrosinase contenue dans les gélules n’est pas issue de biofermentation, mais extraite d’une variété spécifique de brocoli. Cependant dans la mesure où la molécule produite est identique à un métabolite bactérien, ce produit pourrait tout à fait être qualifié de postbiotique (sauf si à l’avenir une définition plus précise émerge pour les postbiotiques précisant que ces molécules doivent être issues de biofermentation).
Les amis des animaux seront heureux d’apprendre que la recherche scientifique sur les « biotiques » ne se limite pas à la santé humaine. Il existe également des études sur ces actifs dans le domaine de l’alimentation animale. Par exemple, en 2014, une équipe de chercheurs s’est intéressée à l’effet d’une supplémentation en postbiotiques sur la qualité des œufs produits par les poules pondeuses[3].
Bref, le sujet des parabiotiques et postbiotiques est un domaine d’étude passionnant qui nous réserve probablement de bonnes surprises pour les années à venir, dont nous ne manquerons pas de vous faire part sur Nutrixeal Info !
MISE À JOUR : JANVIER 2023
Depuis janvier 2023, la France autorise officiellement l’utilisation du terme « probiotique » pour les compléments alimentaires qui contiennent des microorganismes vivants en quantité suffisante (supérieure à 107 UFC/jour) permettant d’obtenir un effet bénéfique sur la santé en participant à l’équilibre de la flore intestinale. La France a également décidé d’autoriser sur ces produits l’emploi de l’allégation de santé : Les probiotiques contribuent à l’équilibre de la flore intestinale.
Références
[1] Tsilingiri, K., and Rescigno, M. (2013). Benef. Microbes 4, 101–107.
[2] Nataraj, B.H., Ali, S.A., Behare, P.V., and Yadav, H. (2020). Microb. Cell Factories 19, 168.
[3] Loh, T.C., Choe, D.W., Foo, H.L., Sazili, A.Q., and Bejo, M.H. (2014). BMC Vet. Res. 10, 149.