Le corps humain héberge plus de 10 000 milliards de microorganismes, principalement dans l’intestin, mais également au niveau de la peau, de la bouche ou encore des voies respiratoires et génitales. Il s’agit principalement de bactéries, mais on y trouve également des champignons ou d’autres parasites non pathogènes. Ces populations bactériennes, bénéfiques au fonctionnement de notre organisme, composent ce que l’on nomme les microbiotes.
Caractéristiques des microbiotes humains
On distingue plusieurs microbiotes au sein de l’organisme humain. Les populations microbiennes retrouvées au niveau de nos intestins, de nos voies respiratoires, de notre appareil génital ou de notre peau, sont en effet très différentes.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Le terme microbiote vient du grec ancien mikros « petit » et biotos « vie ».
On distingue ainsi le microbiote buccal, respiratoire, intestinal, vaginal, oculaire ou encore cutané. Le microbiote intestinal est le plus développé, tout particulièrement au niveau du colon. Il est assez logiquement également le plus étudié. Il se caractérise par une très grande diversité : on peut distinguer plusieurs centaines d’espèces bactériennes différentes.
Les microbiotes commencent à se mettre en place à la naissance (populations bactériennes en partie héritées de la mère) et se construisent petit à petit en fonction de nombreux critères (alimentation, traitements antibiotiques, environnement, etc.) La composition des microbiotes est ainsi différente selon les individus. On estime que la moitié seulement des espèces serait communément retrouvée d’un individu à l’autre, et seulement quelques dizaines seraient présentes chez tous les individus (sur environ 160 espèces par individu).
Le développement des méthodes de séquençage permet désormais de pousser plus loin l’analyse et la compréhension de ces populations bactériennes abritées par notre organisme. Une étude de 2014[1] a répertorié un catalogue de près de 10 millions de gènes différents du microbiote intestinal, dont un peu moins de 300 000 seraient partagés par la moitié des individus.
Plus de 30 phyla sont représentés au sein de notre microbiote intestinal, mais les Firmicutes et Bacteroidetes sont majoritaires (plus de 90% du microbiote colique).
À NOTER
Il existe un lien entre le microbiote vaginal et le microbiote intestinal. Au niveau des organes génitaux notamment, les bactéries peuvent passer de l’anus au vagin. Le microbiote intestinal peut donc transmettre une partie de ses bactéries à la flore vaginale[2].
Fonctions biologiques des microbiotes
Une fonction barrière pour tous les microbiotes
Les différents microbiotes de l’organisme assurent tous en premier lieu une fonction barrière. Localisés au niveau des muqueuses, ils sont à l’interface entre notre organisme et l’environnement extérieur. Leur présence sature l’espace, freinant ainsi la fixation de microorganismes pathogènes. Les bactéries des microbiotes rendent par ailleurs moins disponibles les nutriments nécessaires à la prolifération des bactéries pathogènes. Certaines bactéries du microbiote produisent également des molécules spécifiques (des bactériocines), capables de tuer d’autres espèces bactériennes indésirables.
Au niveau du microbiote vaginal, également appelé flore de Döderlein, les bactéries lactiques forment un biofilm qui agit comme un véritable bouclier. Composé à 90% de lactobacilles qui produisent de l’acide lactique, le microbiote vaginal contribue au maintien du pH vaginal nécessaire (entre 3,5 et 4,5).
De nombreuses études tendent à montrer que les microbiotes joueraient également un rôle important dans le fonctionnement du système immunitaire. Les bactéries commensales pourraient par exemple induire les lymphocytes T régulateurs afin de réguler les réponses inflammatoires, ou encore stimuler la production de peptides antimicrobiens par les cellules des épithéliums. Les mécanismes d’interaction avec le système immunitaire sont nombreux et complexes, et sont loin d’être complètement identifiés à l’heure actuelle.
Le cas du microbiote intestinal
Au niveau intestinal, le microbiote joue un rôle indispensable pour notre système digestif. Les bactéries qui le composent contribuent en effet à la bonne assimilation des nutriments fournis par notre alimentation (grâce à la production d’enzymes par exemple).
Elles fermentent par ailleurs les résidus alimentaires non digérés. Elles produisent alors des AGCC (acides gras à chaîne courte), ensuite rapidement assimilés et indispensables à notre métabolisme énergétique. Ces AGCC servent notamment de substrat énergétique pour les cellules intestinales. Les bactéries lactiques (Bifidobacterium, Lactobacillus, Streptococcus et Enterocossus notamment) sont également capables de métaboliser les glucides pour produire du lactate (forme ionique de l’acide lactique).
Certaines bactéries de notre microbiote intestinal sont également capables de métaboliser des substrats protéiques et participent au métabolisme des lipides (principalement via leurs interactions avec les acides biliaires).
Le microbiote intestinal joue enfin un rôle important dans la synthèse de vitamines essentielles. Certaines bactéries synthétisent par exemple la vitamine B12, nutriment que notre métabolisme ne sait pas produire.
Les études de plus en plus nombreuses sur le microbiote intestinal s’intéressent également à son interaction avec d’autres fonctions biologiques, notamment le système immunitaire, mais également le système nerveux.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Un déséquilibre du microbiote est appelé « dysbiose ». L’étude du lien entre des dysbioses et certaines pathologies est l’un des axes de recherche les plus prometteurs sur le sujet et permet d’apporter un éclairage de plus en plus approfondi sur les interactions complexes entre nos microbiotes et nos fonctions biologiques.
Références
[1] Li J, Jia H, Cai X, Zhong H, Feng Q, Sunagawa S, Arumugam M, Kultima JR, Prifti E, Nielsen T, Juncker AS, Manichanh C, Chen B, Zhang W, Levenez F, Wang J, Xu X, Xiao L, Liang S, Zhang D, Zhang Z, Chen W, Zhao H, Al-Aama JY, Edris S, Yang H, Wang J, Hansen T, Nielsen HB, Brunak S, Kristiansen K, Guarner F, Pedersen O, Doré J, Ehrlich SD; MetaHIT Consortium, Bork P, Wang J; MetaHIT Consortium. Nat Biotechnol. 2014 Aug;32(8):834-41. doi: 10.1038/nbt.2942. Epub 2014 Jul 6. PMID: 24997786.
[2] Cribby S, Taylor M, Reid G. Interdiscip Perspect Infect Dis. 2008;2008:256490. doi: 10.1155/2008/256490. Epub 2009 Mar 29. PMID: 19343185; PMCID: PMC2662373.